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ARN - molécule centrale de la vie

Si la plupart des gens connaissent le terme "ADN", le terme "ARN" est beaucoup moins connu. Alors, qu'est-ce que l'ARN et pourquoi consacrons-nous un site web entier à cette molécule ? Nous vous donnons ici un aperçu des nombreuses fonctions de la molécule d'ARN et de leur importance dans la recherche de pointe et le développement de médicaments.

L'ARN joue un rôle central dans la production des protéines via le transfert de l'information génétique. En outre, il porte l'information génétique de nombreux virus, et il pourrait même avoir été responsable de la création de la première forme de vie sur Terre. Compte tenu de ces tâches importantes, il n'est pas surprenant que des erreurs de production ou de dégradation des molécules d'ARN puissent avoir de lourdes conséquences pour une cellule et ainsi mener à des maladies.

Le dogme central de la biologie moléculaire

ARN est l'acronyme des mots "acide ribonucléique". Comme son nom l'indique, l'ARN (tout comme l'ADN) est un "acide nucléique" et donc l'une des macromolécules considérées comme essentielles à la vie. L'ADN est l'entrepôt de l'information génétique dans la cellule : il est présent sous la forme d'une longue molécule dans (presque) toutes les cellules de chaque être vivant. Si un certain gène, c'est-à-dire une section spécifique de l'ADN, doit être lu, il est d'abord transcrit en ARN. L'ARN transfère ensuite l'information génétique à la machinerie cellulaire (les "ribosomes") qui produit les protéines correspondantes. Ce flux d'informations allant de l'information génétique originale (ADN) à la production de protéines, en passant par la molécule messagère ARN, est si important pour la vie que les biologistes l'appellent "le dogme central de la biologie moléculaire". Pour en savoir plus...  

Alors que (presque) toutes les cellules d’un organisme possèdent le même ADN présent sous forme de chromosomes, la composition des ARN varie considérablement et dépend de combien de copies d'ARN sont produites et à partir de quels gènes. Cette composition en ARN est importante pour l'"identité" des cellules, car c'est finalement cette composition qui détermine les protéines que la cellule produit et donc les fonctions qu'elle peut remplir, qu'il s'agisse d'une cellule musculaire, nerveuse ou immunitaire, par exemple.

La structure de l'ARN

Au niveau chimique, l'ADN et l'ARN sont très similaires. La capacité de l'ADN et de l'ARN à stocker et à transmettre des informations génétiques dépend des unités nucléotidiques de ces molécules. Ces unités nucléotidiques sont assemblées en séquences spécifiques qui peuvent être lues comme les mots d'une phrase. Bien que la structure de base de l'ADN et de l'ARN soit très similaire, les deux types d'acides nucléiques présentent des particularités chimiques caractéristiques qui sont importantes pour leurs différentes fonctions.

Plus qu'une simple copie de l'ADN

Bien que la structure chimique de l'ARN soit très similaire à celle de l'ADN, l'ARN a beaucoup plus de fonctions potentielles à exercer dans la cellule. En fonction de leur rôle, de leur structure ou de leur longueur, on peut distinguer différentes classes d'ARN, avec par exemple :

  • Les ARNm en tant que molécules messagères : ils transfèrent l'information génétique de l'ADN aux protéines (ARNm = "ARN messager").
  • Les ARNt en tant que molécules d'interprétation : ils reconnaissent la séquence d'ARN et la traduisent en séquence d'éléments constitutifs des protéines (les acides aminés) (ARNt = "ARN de transfert").
  • Les ribozymes comme biocatalyseurs : ils peuvent catalyser des réactions chimiques. (Sidney Altman et Thomas Cech ont reçu le prix Nobel de chimie en 1989 pour la découverte des propriétés catalytiques de l’ARN).
  • Les miRNA ou lncRNA en tant qu'éléments régulateurs : ils peuvent réguler différents processus cellulaires (par exemple, miRNA = "micro-ARN", lncRNA = "long ARN non codant", ...).
  • L'ARN génomique comme stockage de l'information génétique : Il existe des virus qui stockent l'information génétique sous forme d'ARN (et non d'ADN).

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L'ARN à l’origine de la vie

La polyvalence de l'ARN a largement contribué à l'émergence de l'idée que l'origine de toute vie sur terre repose sur la molécule d'ARN.

Pendant longtemps, la science s'est demandé comment un système aussi complexe de transmission de l'information héréditaire (basé sur l'ADN, l'ARN et les protéines) avait pu émerger de la "soupe primordiale" il y a plusieurs milliards d'années. Certes, l'ADN est un entrepôt idéal d'informations, mais il n'est en revenche pas très polyvalent. Les cellules dépendent également d'autres molécules pour leur survie, leur croissance et leur reproduction, en particulier des protéines. En effet, les chaînes de protéines sont particulièrement bien adaptées pour être repliées et assemblées en toutes sortes de machines moléculaires. Cependant, les protéines ne peuvent pas stocker d'informations ni se reproduire elles-mêmes. L'ADN a donc besoin des protéines pour fonctionner et les protéines ont besoin de l'ADN pour exister. L'ARN, en revanche, peut faire les deux : stocker des informations et se replier pour former des machines chimiques. C'est pourquoi de nombreux scientifiques pensent que les premiers précurseurs de la vie étaient exclusivement constitués d'ARN. L'ADN et les protéines ont été "inventés" plus tard. Bien sûr, nous ne savons pas vraiment comment tout cela s'est produit. C'est pourquoi l'idée que l'ARN soit à l'origine de la vie est appelée une hypothèse. Dans le jargon technique, on appelle cela "l'hypothèse du monde à ARN".

Une base pour le génie génétique et le développement de médicaments

En tant que molécule, l'ARN n'est pas seulement fascinant en raison des nombreuses fonctions qu'il remplit dans la cellule. La recherche sur l'ARN et ses fonctions a permis de développer des méthodes qui peuvent être utilisées pour interférer spécifiquement avec les processus cellulaires. Cette manipulation ciblée de la cellule trouve son application dans la recherche fondamentale actuelle mais également dans le développement de médicaments et de thérapies. Voici quelques exemples de la façon dont l'ARN a conquis la médecine :

La découverte de l'interférence ARN (ARNi) à la fin des années 1990 a constitué une étape importante dans la recherche en biologie moléculaire. Pour la première fois, de courtes séquences d'ARN ont pu être utilisées pour éteindre des gènes de manière spécifique. Andrew Fire et Craig Mello ont reçu le prix Nobel de physiologie ou de médecine en 2006 pour la découverte de l'ARNi. Aujourd'hui, la méthode des ARNi est largement utilisée dans la recherche en biologie moléculaire mais également en médecine. Actuellement, deux médicaments basés sur la méthode de l'ARNi ont reçu une approbation pour être administrés : le Patisiran (pour le traitement de l'amyloïdose héréditaire ATTR) et le Givosiran (pour le traitement de la porphyrie aiguë intermittente). D'autres médicaments basés sur l'ARNi sont en cours de développement.

Les oligos antisens (ASOs) sont de petits fragments d'ARN synthétiques qui peuvent être utilisés pour cibler une étape importante de la production d'ARN (l’épissage). Il existe déjà plusieurs médicaments utilisés qui sont basés sur des molécules ASO, par exemple l'eteplirsen (pour le traitement de la dystrophie musculaire de Duchenne) ou le nusinersen (pour le traitement de l'amyotrophie spinale).

Comme les ASO, les antagomirs sont également des petits morceaux synthétiques d'ARN qui peuvent être délivrés dans les cellules humaines. Cependant, les antagomirs ont pour fonction de se lier à des micro-ARN spécifiques dans la cellule, les rendant ainsi inactifs. Un exemple d'antagomir développé en tant que médicament est le miravirsen. Il sera utilisé à l'avenir pour traiter les infections chroniques par le virus de l'hépatite C (VHC).

CRISPR/Cas9 fait actuellement parler de lui, car ce système révolutionne la recherche et le développement thérapeutique : à l'aide de courts ARN, il est désormais possible de cibler l'ADN avec des ciseaux à gènes, puis de modifier sa séquence de manière ciblée. Cette méthode de génie génétique ouvre de nouvelles voies, non seulement dans la recherche, mais aussi dans l'industrie pharmaceutique. Divers médicaments basés sur la technologie CRISPR sont en cours d'essais cliniques. Un exemple est le Sepofarsen, qui est conçu pour aider les patients atteints d'amaurose congénitale de Leber à retrouver la vue. D’ailleurs, Jennifer Doudna et Emmanuelle Charpentier ont récemment reçu le prix Nobel de chimie pour avoir développé cette méthode d'édition du génome.

En un temps record, une nouvelle classe prometteuse de vaccins a été mise au point lors la pandémie actuelle de Covid-19. Les vaccins dits à ARNm sont conçus pour conférer une immunité contre le virus SARS-CoV-2. Le vaccin est basé sur un ARNm produit synthétiquement qui est absorbé par les cellules et les amène à produire certains composants caractéristiques mais inoffensifs du virus. Ceux-ci sont ensuite reconnus par le système immunitaire et une réponse de défense peut alors être développée. Ainsi, en cas d’infection par le virus SARS-CoV-2, le système immunitaire est capable de reconnaître rapidement le virus et de le combattre immédiatement.

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ARN et maladies

Après avoir pris conscience du rôle central de l'ARN pour la cellule, il n'est pas surprenant d’apprendre que des maladies puissent être causées par des erreurs se produisant au niveau de la production ou de la dégradation de l'ARN, affectant ainsi la fonctionnalité de la molécule. La production et la dégradation des ARN sont des processus moléculaires complexes comprenant de nombreuses étapes. Si des erreurs se glissent au cours de ces étapes, cela peut avoir des conséquences dramatiques pour l'organisme. On peut citer l'atrophie musculaire spinale ou la protoporphyrie érythropoïétique, le syndrome de Prader Willi, ainsi que de nombreux types de cancer.

L'ARN n’est donc pas seulement une molécule diversifiée et fascinante, mais son étude est également très prometteuse afin de trouver de nouvelles approches thérapeutiques contre des maladies pour lesquelles il n'existe actuellement aucun traitement. L'ARN révolutionne actuellement la médecine à bien des égards, notamment grâce à des décennies de recherche fondamentale menée par des chercheurs spécialistes de l’ARN du monde entier.

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